Lettre publique au cadavre de Friedrich Nietzsche, l’enfoiré

Salut Frédo ! Je n’espère pas que tu vas bien car heureusement tu es mort depuis 112 ans et, malgré ton concept stupide d’ « éternel retour », tu n’as jamais eu le mauvais goût de réapparaître. Tu es donc intégralement mort à tout jamais et pourtant, ta philosophie à la con t’a survécu, et c’est bien ça qui m’agace, donc je vais faire en sorte de contribuer à l’assassiner, à la faire disparaître elle aussi à tout jamais. Je ne dis pas que je vais réussir, du moins je vais essayer !

Alors, d’abord je dois te dire que quand je t’ai découvert, je t’ai adoré. Bon, j’avais 17, 18, 19, 20 ans, etc, et je découvrais la philosophie en général. J’y ai rencontré parmi les auteurs les plus bêtes que j’aie jamais vus, et j’y ai lu des textes remplis d’idées délirantes, des pseudo-rationalités largement entachées d’erreur, des pseudo-objectivités totalement subjectives, des arguments à se pisser dessus de rire, et mille autres conneries. Vous, les philosophes, avez excrété une sacrée montagne de merde idéologique, qu’on pourrait presque confondre avec les déchets toxiques d’un élevage de porcs !!

Par exemple :

– En découvrant Platon, j’étais ulcéré: dialogue après dialogue, ce menteur invétéré accumulait les sophismes. Dans des argumentations fourbes et malhonnêtes au possible, il trahissait tous ceux qu’il évoquait : son « maître » Socrate bien sûr, mais aussi et de manière encore bien plus choquante, ces sophistes que je trouve presque tous supérieurs à lui, et plus honnêtes !

– En découvrant Kant et Hegel, j’étais atterré : comment peut-on écrire aussi mal ??? comment peut-on aligner autant d’expressions lourdes, maladroites, obscures comme le cul d’un âne ? Je n’ai jamais trouvé la réponse à cette question, j’ai juste jeté leurs beaux ouvrages à la poubelle. Penseurs totalisants obscurs, penseurs pré-totalitaires de l’obscurantisme !

– En découvrant Descartes, je crois que j’ai touché le fond. Cet imbécile notoire qui accumule les erreurs de logique et a illustré sa philosophie par une vie merdique de bout en bout en se payant le luxe de crever d’un rhume à la cour de la reine de Suède (mais bon, Kant et Hegel aussi étaient des médiocres célèbres inaptes à vivre une vie belle) m’a scandalisé par sa théorie des animaux-machines : quand on frappe un chien et qu’il aboie de douleur, monsieur le rationaliste René Descartes dit qu’il s’agit de petites courroies et poulies dans le corps du chien !! Le chien n’a pas mal, dit Descartes, ce sont les petites courroies et poulies qui crient ! Franchement, un psychotique sadique n’aurait pas dit mieux, et j’aurais bien voulu vivre à l’époque de ce tortionnaire d’animaux pour torturer un peu moi aussi ses petites poulies et courroies : Descartes n’aurait pas eu mal, ses mécanismes inertes se seraient simplement agités en vain… Ah, mais non, parce que Descartes, lui, se voyait comme un être divin, propriétaire d’une âme immatérielle (et la preuve de cette âme est fournie où ça, René Ducon ? dans un quelconque « Je suis con, donc je suis? » ?) La conscience des animaux vertébrés est de l’ordre de l’évidence de l’expérience la plus simple, même les chasseurs le savent, et il suffit de regarder un chat ou un chien dans les yeux pour sentir qu’il y a là l’occasion d’un dialogue entre consciences, entre sensibilités, et pas d’un rapport mécanique et sans vie ! De plus, si ce crétin avait simplement voulu se donner la peine d’autopsier un chien mort, où aurait-il trouvé les poulies ? Il n’a même pas cherché à vérifier, ça montre assez son amateurisme et le fait qu’il ne parlait que du haut de sa colossale bêtise. Avant lui, Vesale avait autopsié des corps humains – et il n’y avait pas trouvé d’âme, ni de poulies.

– Je ne parle même pas du cas de Heidegger. Non, je ne parle même pas du cas de Heidegger !!!!!!!!!!!!!!! fasciste chinois !!!

Je pourrais continuer la liste un moment.(Mais qu’on n’aille pas croire que j’en veux à tous les philosophes: j’en aime et respecte plein : Diogène, Héraclite, Aristote, Leibniz, Spinoza, Hume, Hobbes, La Boétie, par exemple, eux ça va. Plusieurs d’entre eux aimaient vraiment les animaux et la vie.)

En te lisant, Frédo, j’ai d’abord ressenti tout le contraire de ce que j’ai ressenti avec les scatosophes (= les sages de merde) précédemment mentionnés : toi au moins, tu as un style lisible, plutôt joli, et tu ne prétends pas avoir tout compris de l’univers et pouvoir le formaliser en système à ton avantage. Toi au moins, tu faisais un peu preuve d’esprit critique.

J’ai bien aimé ton Antéchrist, aussi beaucoup ta Généalogie de la morale, ton Gai savoir, ta Naissance de la tragédie, et quelques autres. J’ai bien aimé certaines idées ça et là. Mais avec les années la fascination que tu exerçais a été totalement réduite à néant et j’en suis venu à te réévaluer totalement – tu sais, cette idée vient en partie de toi, « réévaluation de toutes les valeurs », et « crépuscule des idoles »: ben c’est ton tour d’y passer, vieux ! 🙂

Je déteste et méprise aujourd’hui ta philosophie parce que :

– Dans ta vie, tu n’as rien été d’autre qu’un gigantesque hypocrite. Tu as passé une partie de ton temps à penser à la « grande santé » alors que tu as été un malade permanent. Tu t’es même payé le luxe de finir ta vie en une longue agonie de 10 ans où le grand penseur était devenu un petit légume inerte. Franchement, la honte. On sait que tu avais des rapports compliqués avec les juifs et avec l’antisémitisme, mais c’est dommage que la chronologie n’ait pas permis de faire de toi un patient d’un juif génial, le docteur Sigmund Freud : il n’aurait pas mis longtemps, lui, à creuser dans tes profondeurs mentales pour y trouver des complexes bien sales, notamment un déni pathologique complet de ton état de santé réel que tu idéalisais comme un taré. Tu n’as pas vraiment brillé par ton honnêteté ni par ta lucidité, là-dessus. Moi par exemple, je suis malade, mais je ne suis pas aveugle sur le fait que je le suis. Et tu méprisais les malades, tu te méprisais toi-même…

– Tes rapports avec les femmes ont été une catastrophe permanente. Là encore, Freud suffit à te comprendre : tu as idéalisé des figures féminines, cherché à voler les copines des hommes que tu admirais sur un mode homosexuel refoulé, c’est clair comme de l’eau de roche. Au lieu d’être un homme, un animal bien-portant, tu as été un malade sexuel, un homme qui pendant des années philosophait sans jamais faire l’amour, sans jamais te vider les couilles et la tête de tes pulsions sexuelles, qui ont fini par pourrir en toi. Bordel de merde, comment tu pouvais prétendre fournir une quelconque pensée en vivant comme un moine chrétien dans la chasteté éternelle, toi censément anti-chrétien ?? Moi tu vois, je ne suis pas un philosophe célèbre mais au moins il m’arrive de baiser et quand ça arrive, je fais jouir mes partenaires féminines, ce qui n’a pas du t’arriver souvent, trouduc viril. Tu as écris pas mal d’aphorismes d’une misogynie abjecte, du genre « la femme est un torchon sur l’œil du téléscope ». Ah, la belle intuition : ensuite, quand la Nouvelle-Zélande en 1914, soit 14 ans après ta mort, a donné le droit de vote aux femmes, puis quand tant d’autres pays ont suivi le mouvement (ton pays l’Allemagne en 1917, mon pays la France en 1944), on a bien vu que les femmes faisaient d’aussi bonnes, voire meilleures, politiciennes et gestionnaires que les hommes. En l’occurrence, tu voyais la paille dans l’œil de ces femmes qui t’avaient refusé leur amour, sans voir l’énorme poutre qui te traversait la tête de part en part !! Pauvre imbécile de macho de mes deux. Se tromper avec génie, ça reste se tromper. Philo-sophe ? Amoureux de la sagesse ? Haineux de la bêtise, oui !!

– Tu étais un spécialiste de ces Grecs antiques que moi je considère comme des gros porcs idiots et proto-fascistes. Tu as étudié et enseigné leur langue, leur philo, leur art, ils te fascinaient, tu les aimais. Tu étais l’ami de mes ennemis.

– Tes concepts les plus insistants, la « Volonté de puissance », le « Surhomme », c’est pareil, ça schlingue le déni, la haine de soi et d’autrui, l’idéalisation stérile. Tes concepts ont eu des lecteurs, on a déjà fait ton procès en nazisme. Qu’aurais-tu fait si tu étais resté en assez bonne santé pour assister à l’ascension du petit brun médiocre qui se rêvait en grand blond victorieux ? Né en 1844, tu aurais pu tenir assez longtemps pour voir au moins le putsch hitlérien raté de 1923 à Münich, et faire un commentaire ? Qu’aurais-tu dit ? Je ne suis pas sûr que tu aurais été nazi ou d’extrême-droite. Mais je ne me sens pas en état d’affirmer que tu ne l’aurais pas été. Il y a trop d’éléments dans ta pensée qui vont clairement dans le même sens que les nazis. Entre autres la misogynie et la haine d’autrui et l’amour des guerriers racistes grecs.

– Par ailleurs, au sujet de ces mêmes concepts, je ne vois pas, et je ne pense pas qu’on puisse voir, une quelconque possibilité de mise en application concrète. Donc, euh, le cycle des métamorphoses, le lion, l’enfant, le surhomme, tout ça, tu pensais que des gens allaient vraiment pouvoir y venir ? Combien de gens ? Tout le monde, ou une élite, et dans ce cas, quid des autres, tous des esclaves, des insectes à éliminer ? Une fois la joliesse de la métaphore savourée, comment fait-on pour vivre une vie conforme à ta philosophie à la con, dis-moi, cher cadavre ? Cela ne m’apparait pas vraiment évident. Moi j’ai une philosophie basée sur le matérialisme ontologique dont je fais découler directement une morale et une politique libertaires : mes idées ne restent pas à planer à mille lieues au-dessus du réel, elles servent à m’ancrer dans la vie et l’action par des choix concrets d’affirmation ou de refus. Toi ta philosophie on peut juste la lire, on ne peut pas la vivre, et là c’est pas nazi: c’est juste naze.

– Pour finir, j’ai lu ta poésie. J’ai rarement lu des choses aussi fades et laides, manifestement tu ne comprenais pas bien de quoi il retournait et tu n’avais même pas le bon goût de t’apercevoir que tu n’étais pas doté d’une vraie sensibilité poétique !!! Là encore ça confine à l’aveuglement.

Tu vois, on t’a classé dans ces « grands philosophes du soupçon », dans ces auteurs modernes révolutionnaires dont la pensée a occasionné un changement radical de paradigme : Copernic avec sa terre ronde qui n’est PAS au centre de l’univers, Marx avec son matérialisme dialectique qui retourne l’ordre politique et économique du monde capitaliste, Darwin qui montre que nous ne sommes qu’un produit parmi d’autres d’une évolution qui a duré sur des millions d’années et a impliqué pas seulement quelques singes qui se croient malins mais des milliards de milliards d’êtres vivants, et enfin Freud qui a montré que tous les philosophes rationalistes de l’histoire s’étaient totalement trompés en croyant que le sujet pouvait être maître de lui-même et de là, du monde – Freud a montré qu’au contraire on sera toujours dévorés et vampirisés de l’intérieur par notre inconscient et nos désirs de vie et de mort, à la puissance dix fois supérieure aux faibles ressources de notre conscience et de notre volonté affirmée – ce qui donne largement tort à ta foutue « Volonté de puissance » de psychopathe lettré.

Eh bien, tu sais quoi, Frédo ? Je garde Copernic, Marx, Darwin et Freud, et leurs descendants philosophiques et scientifiques. Mais toi, tu as trop démérité, je te radie de ma liste ! Tu es recalé à l’examen que je fais de ton œuvre philosophique selon ma vie, mon corps et mes valeurs, je te gifle avec ton enseignement enfoiré, tu as raconté trop de conneries, tu as trop mal vécu, tu as trop montré que tu n’étais pas apte à penser de manière saine et équitable – tu éliminais les femmes, les « faibles », les « esclaves », etc, avec toi au pouvoir on aurait probablement versé dans un génocide multi-catégoriel façon grande puissance industrielle. Tu es mort seul à tout jamais, et maintenant c’est aussi ton œuvre qui est morte pour moi à tout jamais. Adieu, cadavre oublié.

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